Épisode 20 - Un jour sans fin
En préambule, je tiens à préciser que le titre de ce billet fait référence au cultissime film éponyme avec Bill Murray et Andie MacDowell. À voir, si vous en avez l’opportunité. M’enfin pas de panique si vous ne l’avez pas vu, vous comprendrez l’article quand même. Ça, c’est fait.
Une question revient souvent quand vous êtes au chômage : « Mais tu te fais pas trop chier la journée ? »
Et bien figurez-vous que non.
Je sais ce que vous pensez ; vous devez vous dire que quelqu’un de supérieurement intelligent comme moi doit fourmiller d’idées pour occuper son temps libre.
Vous n’avez pas totalement tort.
Et encore, je n’ai pas tant que ça besoin de chercher quoi faire ; je croule déjà sous de nombreuses occupations, me faisant presque souhaiter qu’il y ait plus de 24 heures dans une journée.
Non non, je n’exagère pas. La preuve, je n’ai même pas le temps de vous pondre des articles plus régulièrement qu’à ce rythme de feignasse qui me caractérise depuis quelques semaines. Pour prendre un exemple qui parlera à pas mal d’entre vous, j’ai acheté le nouveau Zelda il y a deux mois et n’y ai pourtant joué qu’une dizaine d’heures. J’ai même pas passé le premier boss, c’est pour vous dire…
Soit dit en passant, si je me faisais réellement chier, je ne le dirais pas. J’ai ma fierté, comme tout le monde… Mais j’insiste, j’arrive à pas trop mal occuper mes journées. Et je vais même vous le prouver, ça me permettra de torcher un article supplémentaire.
La journée-type d’un chômeur (enfin, la mienne en tout cas) :
Comme tous les jours, j’essaye de ne pas me lever trop tard. Je n’aime pas faire le tour de l’horloge. Ce n’est pas que je culpabilise particulièrement de me lever après midi quand d’autres font sonner leur réveil à sept heures (et même je m’en fous un peu !) ; c’est juste que je n’aime pas voir le temps passer sans en profiter, et je considère que je n’en profite pas en passant dix heures au plumard.
Comme tous les jours, je reste à l’affût en attendant que mon téléphone se mette à sonner (ou à vibrer). Et dans 95% des cas je déchante car c’est, au choix, quelqu’un qui s’est gouré de numéro, quelqu’un qui m’a appelé sans faire exprès, un put*** de numéro en 0899 qui m’appelle pour me taxer des thunes, mon téléphone qui me signale que la batterie est déchargée, ou encore un SMS m’indiquant que le Casino Partouche que j’ai l’habitude de fréquenter m’invite à une soirée spéciale « Venez toucher les gros jetons de nos hôtesses. » Bref, tout sauf des appels pour du boulot.
Comme tous les jours, je fais mes recherches d’offres d’emploi à la même heure, en allant voir les mêmes sites, dans le même ordre, en y passant donc grosso modo le même temps, et comme tous les jours je trouve très peu d’offres intéressantes. Approximativement, entre zéro et une. Surtout zéro, en fait.
Comme à peu près tous les jours, je me fais chier à envoyer des candidatures spontanées qui ne servent à rien. Jacques Lacan a dit un jour : « L’amour, c’est donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas ». Les candidatures spontanées, c’est un peu pareil ; vous envoyez un profil pas assez intéressant à une entreprise qui n’a pas de boulot à vous proposer. Inutile, mais vous le faites quand même parce que ça fait partie de la recherche d’emploi et parce que votre conseiller Pôle Emploi vous gonfle systématiquement avec ça.
Comme tous les jours, j’évite au maximum d’avoir d’interminables discussions sur ma situation qui pourraient se révéler fortement désagréables pour mes interlocuteurs, en fonction de mon humeur du jour. Les leçons de morale, c’est chiant. Le meurtre avec violence, ça soulage.
Comme tous les jours, je prends le temps de lire la presse généraliste et sportive. C’est bon pour la culture générale et surtout ça repose les yeux. Bon en revanche, ce n’est pas tout à fait « comme tous les jours ». Du coup, j’ai pris un peu de retard que j’ai une fâcheuse tendance à accumuler. Pour tout vous dire, dans mon univers bien particulier, la Coupe du Monde de Rugby vient juste de s’achever et il est temps de se préparer à dénicher de bonnes affaires pour Noël. Ne cherchez pas à comprendre, je suis juste taré.
Comme tous les jours, je zappe sur les différentes chaînes musicales pour obtenir un fond sonore avant de vite regretter, une fois que j'ai constaté à quel point la musique actuelle est merdique.
Comme tous les jours, je prends le temps d’aller sur Internet pour vérifier :
- les évolutions de mon métier (traduction : quelle nouvelle saloperie Google a trouvé pour se faire détester), si tant est que je puisse encore appeler ça « mon métier » ;
- mes spams, au cas où une réponse d’un recruteur s’y serait malencontreusement égarée ;
- combien de mes contacts Facebook envisagent de se suicider ;
- combien de dizaines de millions d’euros le PSG projette de jeter par la fenêtre ;
- s’il y a de l’eau ou des formes de vie sur la planète XF-38469-TPG#@1658 découverte une semaine auparavant ;
- si les frères Gallagher vont se réconcilier ;
- si j’ai obtenu un septième follower sur Twitter.
Plus important que tout, comme tous les jours, je me réserve du temps pour écrire. Je sais, c’est pas vraiment l’impression que je donne. Et pourtant, j’essaye bel et bien de consacrer au minimum une heure par jour à la rédaction de mes articles… entre autres. :-)
Et comme tous les jours, je vais me coucher à pas d’heure en ayant pourtant affirmé auparavant que, promis, ce soir, je me couche tôt. Et je vais cogiter sur cette situation de merde, regarder l’heure toutes les cinq minutes en stressant à l’idée de ne pas m’endormir et de me lever tard, ce qui m’empêcherait de pleinement profiter d’une nouvelle journée de merde qui s’offre à moi, je vais me tourner et me retourner dans tous les sens pendant une bonne heure avant de trouver le sommeil… Quand je dis « une heure », c’est dans le meilleur des cas.
Aujourd’hui n’échappe pas à la règle, j’ai donc effectué toutes ces choses plus ou moins capitales. Comme les jours d’avant, comme ceux à venir. Bref, aujourd’hui est un jour banal comme n’importe quel… euh… n’importe quel… Shit, on est quel jour aujourd’hui ?
Faut vraiment que je trouve un boulot. Vite.
Générique : The Outatime Orchestra – Back to the Future (« Retour Vers le Futur » OST)